Photo de ma ville étriquée, un jour d'orage |
Le bercail c'est le bled où tu as grandi, c'est la maison dont on reconnaît les odeurs, c'est la place de la Mairie où tu croises des gens que tu connais, même si tu es partie il y a 15 ans. C'est la personne qui sait que tu aimes le quignon de la baguette, que tu ne petit-déjeunes qu'avec des Rice Krispies et du chocolat Poulain. Et qui s'assure d'acheter tout ça avant ton arrivée.
C'est le coin de la planète que tu as considéré étriqué, trop calme et tellement prévisible et qui t'a donné envie de partir. Plus tard, c'est pourtant le même coin dans lequel tu te réfugies et te sens chez toi. C'est tout ça le bercail.
Lorsqu'on ne rentre au bercail qu'une fois par an, qu'on vit loin très loin, on en viendrait presque à idéaliser les 2 petites rues commerçantes qui ont limité notre horizon durant nos 18 premières années. De retour en vacances, en arpentant ces rues si familières, on s'aperçoit qu'elles sont encore plus courtes que dans notre souvenir, et que oui vraiment, on n'en démordra pas, cette ville est définitivement un appel même à prendre un train ou un bus et plus vite que ça.
Puis, sournoisement, insidieusement, s'installe une autre sensation, un blues, une nostalgie, un saudade, pour les souvenirs passés, l'enfance et l'adolescence que l'on ne retrouvera jamais. Ce temps où le grand-père riait encore si fort avec la grand-mère, ce temps où l'on connaissait par cœur le numéro de téléphone de la maison de nos copines, ce temps sans portable, sans internet, tout juste une console de jeux, où nos conversations n'étaient pas interrompues par des messages, ce temps où l'une de mes seules distractions consistait à me battre avec mon frère.
Une évidence, après toutes ces années, c'est dans cette maison qui m'a vue grandir, dormir avec le frérot, me disputer avec les adultes, faire mes devoirs, imploser à l'adolescence, pester contre les "vieux"et revenir en visite tant de fois, oui c'est encore dans cette maison que je me sens le plus chez moi, en sécurité, comme bercée dans un placenta de graisse de canard.
Signe infaillible de l'âge adulte, on prend conscience de ceux que l'on a encore, ces êtres chers et indispensables qui nous font tenir droits et à l'aise dans nos tongues, même à 15.000 km de distance. On savoure la joie de retrouver encore, 36 ans plus tard, le même sourire + parfum qui nous attend à l'aéroport, ce pilier débordant de tout l'amour du monde, infaillible, no limit et for ever. On reconnaît la patience infinie de celle qui ne compte pas les kilomètres parcourus, sûrement plus qu'un tour du monde, de celle qui m'a toujours et partout trimballée, installée, déménagée et transportée au gré de mes journées d'école, goûters d'anniversaires, loisirs, sorties et virées nocturnes (quand il fallait qu'elle me laisse assez près mais pas trop non plus, au cas où l'on s'aperçoive que c'était elle qui me conduisait), de celle qui plus tard m'a soutenue alors que je m'éloignais d'elle, et emmenée prendre mes trains, mes bus et mes avions... jusqu'à que sa fille indigne ne prenne son envol (j'ai dû prendre beaucoup d'élan, j'en conviens, car je n'aurais jamais pensé atterrir aussi loin).
A mes compagnons de bercail, je voudrais dire un muchas gracias du fond del corazon pour être encore là, alors que tant d'amis autour de moi n'ont pas la même chance. Les sourires + parfums nous lâchent parfois trop tôt, les salauds.
Pour celui qui se reconnaîtra, et à qui je dois la moitié de mes chromosomes, un bravo particulier car dieu sait qu'il a fallu s'accrocher parfois fort très fort pour qu'il me lise encore aujourd'hui.
Pour celui qui se reconnaîtra, et à qui je dois la moitié de mes chromosomes, un bravo particulier car dieu sait qu'il a fallu s'accrocher parfois fort très fort pour qu'il me lise encore aujourd'hui.
Il y a des jours comme ça où l'on voudrait stopper le temps, où l'on ne sait plus pourquoi au fond on est parti si loin, où l'on voudrait rester sous la couette, et que le même sourire + parfum nous fasse des câlins, for ever.
Fanette... mi corazon... for ever! merci
RépondreSupprimerTrès beau billet Fanny , beaucoup d'Emotions
RépondreSupprimerMerci
Valerie
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RépondreSupprimerLa belle cité des papes en Avignon? :) Tes mots sont très vrais.
RépondreSupprimerMerci Maman, Valérie et Fanette ! C'est Auch dans le Gers, pays des mousquetaires et de D'artagnan
RépondreSupprimerApres une relecture dans une rue grise de Londres, envie de ce bercail poétique aussi!
RépondreSupprimerOlivier
Que buena querencia en la grasa patonera !
RépondreSupprimerSuper bel article ! très joliment écrit et émouvant :) bon séjour ! (mais revient ! faut qu'on reprenne un autre café!)
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