28 juillet 2009

Le blues de l'émigrée

le Gers en été
Rien de tel qu'un retour aux sources express, improvisé et imposé par des circonstances familiales pour se prendre de plein fouet une nostalgie de son païs. On a beau être content d'être ailleurs, s'estimer chanceux de connaître, découvrir, rencontrer ce(ux) qui est (sont) si loin, je dois avouer qu'à quelques jours du départ j'ai déjà le blues du Sud-ouest en été, des champs de tournesols, du confit servi à table avec autant d'évidence qu'un verre d'eau, du festival de salsa de Tempo Latino à Vic-Fezensac, des siestes avec mon frère et mon chat, des cigarettes avec ma mère à la fin du repas, des dîners au restaurant avec mon père, de la soupe de Mamie, du couple extraordinaire qu'elle forme avec mon grand-père, de cette chaleur écrasante qui nous fait faire quelques kilomètres pour se poser près d'un lac, des visites improvisées et rencontres surprises avec ceux qui partagent le même accent et vocabulaire que moi, les mêmes collège, lycée et souvenirs d'adolescents.

Je n'ai aucune envie là tout de suite de rentrer chez moi à Buenos Aires ou plutôt de repartir là-bas, car qu'est ce qui est vraiment chez moi ? Là où j'ai grandi, où j'ai ma famille, où je ne fais pas 3 pas sans rencontrer quelqu'un que je connais même si je suis partie du coin il y a 10 ans, là où j'ai vécu pendant quelques années, ou là où j'ai décidé de vivre depuis 6 mois ? Difficile d'expliquer que c'est tout à la fois, et que je ressens une appartenance là où j'ai posé mes valises au moins 1 an, où j'ai eu un numéro de téléphone, une adresse et des factures, et surtout des amis et des souvenirs que j'ai laissés derrière moi. Je me sens chez moi à Auch et à Buenos Aires, comme je me sentais aussi chez moi à un moment donné à Mexico, à Paris, à Londres et à Toulouse. C'est grave docteur ?

Quand je croise des Gersois qui n'ont pas bougé de là depuis le bac, et qui ont l'assurance d'être bien chez eux sans avoir le besoin de voir si l'herbe est moins jaune ailleurs, je me surprends parfois à les envier. Quand je raconte que je vis à Buenos Aires, je me surprends parfois à ne pas savoir expliquer "comment c'est là-bas", ni à savoir répondre à la fameuse question "et tu te vois y rester longtemps ?".

A la croisée de l'OVNI et de la déséquilibrée, de l'éternelle insatisfaite et de la post-adolescente attardée, de la voyageuse incomprise et de la rêveuse instable, c'est un peu l'image que je lis dans leur regard. J'aimerai pouvoir justifier, expliquer, dire que "j'ai suivi mon mari", ce qui serait alors une raison valable certainement mais je n'ai pas de mari, merde. Je ne suis pas partie pour des raisons économiques non plus, on ne meurt pas de faim dans le Sud-Ouest, y'a qu'à me voir.
Je suis partie parce qu'on ne vit qu'une fois. Puissiez, vous lecteurs, me comprendre !

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11 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai eu cette même sensation quand je vivais à Madrid et que je revenais en France. On a l'impression d'avoir découpé son cœur en morceaux que l'on a enfermé dans plusieurs coffre-forts. On se surprend à être une personne différente en fonction de l'endroit ou l'on se trouve. En fait, on se découvre aussi un peu à travers le regard des autres. Toi, tu es la Fanny d'Auch mais aussi de Buenos Aires, de Mexico ou de Paris... C'est assez étrange de se voir endosser ces différents caractères aux mille points communs. Je pense que c'est aussi enrichissant que amer et dérangeant à vivre parfois; mais ce ne serait plus une aventure si c'était si facile...:)

Unknown a dit…

Merci d'avoir pu mettre des mots sur ce que je ressens...et n'arrive parfois pas à exprimer.
J'espère que l'on aura l'occasion de se voir à Bs As pour aller boire un cortadito...
Mon Pays Basque natal me manque aussi souvent...

A bientôt

Chéri a dit…

Eun autreu lècqueteureu qui te compraaaaand bièèèèn,
Bisous gascons d'Amériqueuu du Sudeu.

Fanny Dumond a dit…

coucou anne la basque, ecris moi a fannydumond@hotmail.com et donne moi tes coordonnées ! besos

Patxi a dit…

""On a l'impression d'avoir découpé son cœur en morceaux que l'on a enfermé dans plusieurs coffre-forts. On se surprend à être une personne différente en fonction de l'endroit ou l'on se trouve. En fait, on se découvre aussi un peu à travers le regard des autres. Je pense que c'est aussi enrichissant que amer et dérangeant à vivre parfois; mais ce ne serait plus une aventure si c'était si facile...:)mais ce ne serait plus une aventure si c'était si facile...""
Voila, tu as tapé juste toi aussi...sur cette étrange expériencie du édoublement. Une chance, un cheminement, avec ses ornières et ses ponts levis..
t'ain, fanny, je t'échange tes lecteurs contre certains des miens, vale?
Très joli texte. Dédicace dans ma taverne...
UN abrazo

Gabacho cualquiera a dit…

C´est cette decision entre le deracinement enrichissant et le confort ennuyeux qui encore me fait douter de laisser mon lopin de terre (special dedicace a Francis C).
Ceci etant, et comme beaucoup,je me suis reconnu dans le billet. Même si je ne suis qu´un expat de Barcelone, c´est les mêmes regards incrédules que l´on croise quand on revient "à la maison". Le même sentiment de vivre a un autre rythme.

Anne-Marie a dit…

Bonjour Chéri et Patxi!!
Que peut dire la mama de l'émigrée...quand sa fille s'est de nouveau envolée pour une durée indéterminée?rien..sauf que son coeur aussi est en morceaux

Fanny Dumond a dit…

Suite au post de ma mama, j'oubliais l'autre double effet kiss kool de l'expatriation, la culpabilité... a savoir que je suis de retour a buenos aires depuis ce matin, le soleil est la, j'ai retrouvé mon quartier, je suis plutot contente de revoir mi Buenos Aires querido, et pourtant, je sais que j'ai laissé un lit vide tres loin d'ici et du chagrin a ceux que j'aime le plus...

Anne-Marie a dit…

T'inquiète pas, ma douce,sois heureuse à BA. Je t'envoie un peu de la canicule du Gers.Besos

N a dit…

Hola! Je découvre ton blog avec plaisir et comme je te comprend avec ce billet...

Unknown a dit…

Extrano mi pais cuando estoy aca; les rues, l'odeur et le ciel celeste me rongent et me poursuivent dès que je les quitte. Au final l'important est d'être seulement bien.

Une française à Paris après Buenos Aires, Madrid et Sao Paulo